Cahiers anecdotiques de la Banque de France – 4

Cahiers anecdotiques de la Banque de France – 4

Banque de France - Succursale de Lille

Banque de France - Succursale de Lille

Cahiers anecdotiques de la Banque de France

Au XIXème siècle, un vol de billets à la Banque de France

VOL DE 210000 FRANCS DU 21 OCTOBRE 1878

Si, du point de vue économique la succursale de la Banque de France de Lille n’a pas eu d’histoire, en revanche, elle fut le théâtre d’une affaire retentissante que E. Greau, directeur de la succursale de Lille, 1924 va maintenant vous raconter :

Le 21 octobre 1878, dans l’après-midi, M. Perus, sous-caissier de la succursale, voulant effectuer un important paiement, s’aperçut qu’une somme de 210000 francs en billets de 1000 francs, placés dans un casier, avait disparu. Les recherches faites immédiatement permirent d’établir que cette disparition était le résultat d’un vol qui avait été commis dans les circonstances suivantes :

Entre midi et une heure, M. Perus entendant frapper à une des fenêtres de la caisse donnant sur la cour s’était levé et, ayant ouvert, s’était trouvé en présence d’une personne tenant à la main un bouquet de violettes. Pendant que cette personne demandait un renseignement quelconque, évidemment dans le but de détourner son attention, un second individu, qui s’était sans doute dissimulé derrière la tablette devant le grillage, passait la tête et le bras par le guichet qui était resté ouvert, et s’emparait d’une liasse de 210 billets de 1000 francs, placés dans le casier à billets, à 0,80 m du guichet.

Un troisième individu faisait le guet à la porte d’entrée de la galerie.

Ce vol avait été évidemment préparé de longue date, après étude des habitudes de la succursale, et on avait choisi l’heure de la journée où la plupart des employés étaient absents pour le déjeuner.

Les recherches immédiatement entreprises par l’inspecteur de la Sûreté Melin, permirent d’établir que les voleurs devaient être trois individus de nationalité anglaise qui avaient passé la nuit ayant précédé le vol, dans un hôtel de Tournai, et qui étaient arrivés à Lille le matin par le train de 10 heures.

Les bagages laissés par ceux-ci à Tournai ayant permis d’établir que les propriétaires étaient certainement de nationalité anglaise furent envoyés à Londres.

Les investigations de Melin et de la police anglaise mirent sur la piste de trois individus répondant au signalement des voleurs présumés, dont deux avaient tenté de vendre à un changeur environ 200 billets de 1000 francs de la Banque de France ; ce changeur avait refusé, les individus ne lui inspirant pas confiance. Une tentative du même genre faite par une troisième personne n’eut pas plus de succès. Mis sur leurs gardes par ces refus, ces individus, qui étaient évidemment les voleurs, ne revinrent pas, en sorte qu’aucune arrestation ne fut effectuée.

De son côté, le Parquet de Lille était désarmé, se trouvant dans l’impossibilité de poursuivre hors de France des voleurs de nationalité étrangère. L’affaire fut donc classée, tout au moins à ce moment.

En 1880, on arrêta à Anvers un individu de nationalité anglaise qui venait de commettre un vol de 11000 francs. Le signalement de ce voleur paraissant se rapporter à celui d’un des trois auteurs du vol commis à Lille en 1878, on le confronta avec le sous-caissier, M. Perus, qui lui trouva une certaine ressemblance avec l’homme au bouquet. Mais l’affaire ne dut avoir aucune suite, car le dossier ne renferme pas plus d’indication à ce sujet.

En 1882, on arrêta pour vol à Rotterdam un individu nommé Jacobs que l’on crut également être un des auteurs du vol de Lille. Extradé par la justice hollandaise, lorsqu’il eut été condamné, Jacobs fut confronté avec M. Perus et le concierge de la Banque, mais il ne fut pas reconnu par ceux-ci, et l’affaire fut définitivement classée au point de vue judiciaire.

Au point de vue administratif, elle avait eu pour conséquences immédiates l’adoption de certaines mesures de prudence, dont les principales furent la réduction considérable des dimensions de tous les guichets, ceux-ci étant en outre fermés dans l’intérieur par des ailes protectrices, et le placement du casier à billets à un minimum de trois mètres des guichets.

Découvrez le merveilleux Cahiers anecdotiques de la Banque de France N°1 de Didier Bruneel.
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