La carte postale ancienne
La carte postale ancienne, sous la plume de GEORGES-ARMAND MASSON. On n’écrit plus guère de lettres aujourd’hui. Par habitude, nous nommons encore « lettres », les messages qui nous parviennent sous enveloppe, mais ce sont en réalité des factures, des circulaires, des accusés de réception, des commandes, des « faire-part », des avis de paiement-, des sommations sans frais (ou avec frais), rarement des lettres. Et je ne veux pas seulement parler des lettres à la Sévigné ou à la Voltaire — je ne suis pas si exigeant — mais de ces bonnes grosses lettres où en six, huit, voire douze page un amant épluchait sort cœur, une maîtresse lamentait sa solitude, un oncle gourmandait son neveu, un débutant exprimait son admiration à un maître, une jeune mariée confiait à une amie son bonheur où ses déceptions, C’est que, par le temps qui court, et derrière lequel il faut courir, on n’a plus le loisir, d’être amant, ni oncle, ni débutant, ni jeune mariée. Comme la tragédie, comme l’opéra, comme le tableau de bataille, la lettre est un genre qui meurt. Paix à ses cendres…
Les uns disent que c’est le téléphone qui l’a tué, les autres accusent le télégraphe, et il est bien possible que l’un et l’autre aient également trempé dans ce mauvais coup. Mais si l’on suit l’adage des vieux jurisconsultes, « is fecit cui prodest », on se demande si la carte postale n’a pas aussi sa part de responsabilité. Car tout compte fait, c’est surtout la carte postale qui bénéficie de notre désaffection pour l’art épistolaire.
Je ne veux pas croire que la raison de son succès soit l’économie de quelques sous qu’elle nous fait faire. La carte postale a d’autres vertus. La plus apparente, peut-être la plus appréciée, est assurément son caractère simple et sans apprêt. Elle réduit au strict minimum les frais d’imagination. Les « pensées » peuvent sans inconvénient rester informulées : il suffit qu’elles soient affectueuses, et il n’est pas besoin de préciser quelle sorte de « souvenirs » on envoi ? : le destinataire verra bien qu’ils sont froids, cordiaux, tendres, chargés de nostalgie : il n’aura qu’à compter les points de suspension.
Tandis que la lettre, la pudique lettre, hermétiquement enveloppée comme une orientale, demande qu’on la décachette, la carte postale s’en va par le monde sans autre vêtement que son timbre. N’importe qui peut admirer son paysage, et la lire de bout en bout. Elle n’a rien à-cacher. Aussi franchit-elle aisément le cordon douanier de la concierge ou de la famille, et arrive-t-elle presque toujours à destination. On n’en saurait dire autant de la lettre, dont le moindre incident, déchirure ou recollage imparfait, peut interrompre la carrière avant terme. Les usagers de la carte postale connaissant bien cet avantage et ne se privent pas d’en tirer parti.
On n’écrit sur une carte postale ce qui peut être lu de tous, mais ce qui doit être lu de quelques-uns. Il n’est guère qu’un seul cas où il peut arriver qu’on n’ait pas reçu une carte postale : c’est. Lorsqu’on a oublié d’en remercier l’expéditeur. La carte postale est un certificat de déplacement. Une vue du Bosphore ne signifie pas : Je suis à Constantinople, mais : Eh ! oui, mes bons amis, je suis à Constantinople ! El vous ? A Vaucresson, comme tous les ans ?
Le trésor qu’est la carte postale ancienne
Mieux que les plus subtiles formules épistolaires, la carte postale permet d’établir une hiérarchie des sentiments. Il y a des amis à qui l’on envoie la cathédrale, d’autres pour qui la gare suffit bien. La Bruyère écrivait : « Si vous voulez dire qu’il pleut, dites : il pleut ». Sur une carte postale, cela même est bien inutile. Le seul fait d’envoyer des cartes postales signifie clairement qu’il pleut. Sinon, vous pensez bien qu’on aurait autre chose à faire.
La carte postale est un précieux auxiliaire du tourisme. Elle épargne au voyageur la visite des monuments. Elle, améliore ses moyennes. On ne visite vraiment bien les églises que sur cartes postales. L’éclairage est meilleur. La carte postale est souvent supérieure à la nature. Les photographes connaissent l’époque, le jour et l’heure, où les paysages ont le plus d’expression, où les vagues, sont le plus nettes, où les effets de nuit sont le mieux lunés. Et c’est seulement sur les cartes postales qu’on peut voir les paysans en « costumes du pays ».
Et puis, la carte postale est plus animée. Chaque site a ses figurants, qui sont presque toujours les mêmes pour chaque région : des fonctionnaires en veston noir et canotier, des élégantes, en robe cloche et capeline. Tout château du XIVème siècle est orné d’un cycliste, devant toute église il y a des enfants, dont l’un au moins a les doigts dans son nez. Et les panoramas de montagne se présentent avec premier plan de garçons de café.
Dans le vertige du temps qui fuit, la carte postale donne un bel exemple de constance. Elle demeure immuablement fidèle à l’époque des manches à gigot et des doubles-phaétons. Certains vieux maîtres primitifs avaient une prédilection pour un objet ou un animal qu’ils casaient dans tous leurs tableaux. On trouve la même manie chez les éditeurs de cartes postales : leur fétiche est un bec de gaz.
L’album pour ranger les cartes postales anciennes
Aujourd’hui, on sait combien grande est cette place, les collections de cartes postales ont remplacé les collections de timbres-poste dans toutes les maisons, il y a maintenant « L’Album » de cartes postales. La manie de collectionner ces bouts de cartons illustrés est devenue une frénésie ; les voyageurs s’en plaignent; cette manie est devenu très coûteuse et très absorbante. On écrivait, jadis, quinze lettres ; on envoie aujourd’hui deux cents cartes postales, l’administration des postes ne s’en plaint pas.
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